Votre écrivain public préféré vous invite à découvrir, aujourd’hui, le parcours de Heiti Wong, ou comment la Foi et la Détermination de cette mère de famille l’ont aidée à s’épanouir malgré les difficultés de la vie.
Des origines modestes
Heiti est née à Raiatea, dans une famille modeste et dans laquelle la religion avait une place importante. Aînée de quatre enfants, elle grandit auprès de ses deux parents, les aide à s’occuper des plus jeunes et à gagner de quoi nourrir la famille qui vit de la pêche et de l’agriculture. Ainsi, Heiti, dès son plus jeune âge, est emmenée au marché pour vendre les légumes. Elle apprend très tôt que l’argent, ça se mérite par le travail. D’ailleurs, il lui arrive d’aller vendre son petit lot de légumes en porte-à-porte pour avoir un peu d’argent de poche. Son père est un homme droit, sévère et exigeant. A l’école, elle est la meilleure élève de sa classe car il veille à ce que ses enfants mémorisent leurs leçons, à coups de balai ni’au s’il le faut.
Tout se passe relativement bien jusqu’au jour où, à l’office religieux, sa mère est appelée à remplir une fonction qui aurait dû être attribuée à son père. La sérénité du foyer est touchée et bientôt, ses parents se séparent, non sans heurts. Heiti choisit de quitter Raiatea avec sa mère, laissant le reste de la fratrie à Raiatea.
Sans famille
A Tahiti, personne ne les attend. Elles vont dans la famille à Papara. Très vite, sa mère ne lui prête plus guère attention ; elle préfère sortir et s’amuser avec ses amies. Livrée à elle-même, la très jeune fille se débrouille pour tout. Malgré tout, Heiti va à l’école et continue d’y bien travailler. Les vacances scolaires sont son seul répit. Envoyée à Rikitea, chez ses grands-parents maternels, elle peut enfin souffler et redevenir la petite fille qu’elle est encore. Là-bas, elle reste auprès des personnes âgées, va à l’église et participe à la vie collective. Elle y redécouvre la foi simple des gens des îles.
Une nouvelle famille
C’est au retour d’un de ces séjours que la vie va la bousculer encore une fois. Sa mère, sans la prévenir, a décidé de s’installer chez son nouveau compagnon, à Pirae. Le jour de son arrivée, Heiti est donc accueillie par cet homme, qui les conduit chez lui. Heiti est complètement dévastée. Elle a douze ans.
Dans cette nouvelle famille, les choses sont difficiles. La jeune fille grandit dans cet entourage malsain mais elle garde la tête froide.
Discernement
En-dehors de l’école, elle n’a guère de loisirs. Elle a bien quelques amies dans le quartier mais elles sont terribles. Elles fument, boivent et ont un comportement d’ados difficiles mais avec Heiti, elles sont sympas. Elles respectent son attitude de jeune fille sage et sans problème. De son côté, Heiti ressent le besoin d’être en paix et s’oriente vers la foi religieuse. Il se trouve que, près de chez elle, habite une famille qui fréquente régulièrement l’église. Elle profite donc de chaque occasion pour s’y rendre avec eux, se fait baptiser, y suit la catéchèse et fait sa confirmation. Sa mère ne s’y oppose pas et l’aide à se trouver des parrains. Heiti chemine ainsi toute seule, se débrouillant pour participer aux sorties, aux retraites et pour aller à l’église tous les dimanches.
Dans son quartier, malgré les incitations et les tentations diverses, Heiti arrive à respecter les valeurs auxquelles elle tient : droiture, respect, discernement et détermination.
Enfin la paix !
A l’âge de 17 ans, tout bascule encore une fois. Lors d’une soirée, elle fait le mur pour rejoindre ses amies du quartier, car son beau-père lui a interdit de sortir. La jeune fille vit cela comme une injustice car les propres filles de cet homme ont la liberté de faire ce qui leur plaît. Sa mère la retrouve et la ramène sans ménagement à la maison. En colère, Heiti n’en peut plus. Elle fuit, se cache dans le quartier puis se sauve à bord de la voiture d’une de ses voisines. Elle se réfugie chez les bonnes soeurs de l’église, où il lui était déjà arrivé de passer quelques week-ends. De là, elle trouve asile chez un couple de sa famille, à Paea.
Elle y restera trois ans, enfin en paix après toutes ces années agitées.
Finalement, c’est suite à une retraite et à un travail sur elle-même qu’elle acceptera de pardonner à sa mère de l’avoir délaissée et qu’elle rentrera à Pirae.
Détermination
A 20 ans, Heiti commence à réfléchir à son avenir. Elle aimerait se trouver un compagnon, fonder une famille. Dans le quartier, il y a bien un jeune homme qui l’intéresse. Discret et travailleur, il se distingue de tous les autres par le fait qu’il ne passe pas son temps à boire ou à fumer du pakalolo. Heiti l’observe et se dit que c’est l’homme qu’il lui faut. C’est elle qui fait le premier pas. Ils apprennent d’abord à se connaître, à s’apprécier puis s’installent ensemble, chez elle. Sa belle-famille ne voit pas le départ de leur fils d’un très bon oeil car c’est lui qui pourvoit à leurs besoins et cette fille n’a rien, elle ne le mérite pas. Mais Heiti n’en tient pas compte, elle sait qui elle est et ce qu’elle veut.
Toujours au lycée, elle prépare un bac pro de secrétariat. Alors qu’elle est en terminale, elle tombe enceinte. Mais rien ne l’arrête ! Elle décide de terminer son cursus tout en menant sa grossesse. Elle passera d’ailleurs avec succès les épreuves du bac juste quelques jours après avoir mis au monde son petit garçon.
Heiti vit sa vie
Trois ans plus tard, la famille s’agrandit avec leur première fille. Heiti est maintenant mère au foyer. Son mari travaille pour eux, en attendant que son épouse puisse à son tour participer à faire bouillir la marmite. C’est ce que fait Heiti dès que ses deux enfants sont assez grands. Elle occupera ainsi différents postes jusqu’en 2006, où elle est enfin embauchée chez un assureur de la place. Là, elle devient conseillère en assurance, poste qu’elle occupera jusqu’en 2018. Avec ses collègues, tout va bien. Ils sont comme une famille. Elle trouve conseil auprès de l’un des directeurs pour la gestion de ses finances et lorsqu’elle doit décider d’investir.
Car, au cours de ces douze années, Heiti a mûri et s’est épanouie. Avec son mari, ils ont investi dans l’achat d’une maison, puis d’une seconde, toujours dans leur quartier de Pirae et ils se sont achetés un terrain à Teahupoo, sur lequel ils ont construit. En parallèle à son travail, Heiti a monté, avec sa meilleure collègue et amie, une petite affaire de vente de crêpes, puis un petit snack de quartier. Elle fait aussi de la couture, activité qui est sa réelle passion, mais qu’elle n’a pas encore vraiment développée. En 2016, elle pense qu’elle devrait peut-être se mettre à son compte, comme son mari, qui a créé son entreprise de carrelage, car elle commence à ressentir la routine et a envie de changement.
Se former pour devenir meilleure
Par son amie, elle a entendu parler de cette formation au business, la Business Maker Academy. Elle participe à un premier séminaire, en avril 2018, avec son mari et son fils, sans leur dire de quoi il s’agit. Emballée par le contenu du séminaire, elle inscrit tout son monde. La mensualité est élevée pour les trois, mais peu importe. Il n’est plus temps de réfléchir !
Pour payer, ils doivent faire quelques sacrifices. Son mari est dubitatif mais ce que femme veut…
En novembre 2018, sa décision de démissionner est prise. Elle a déjà quelques idées en tête pour se créer une entreprise, à commencer par la mise en location saisonnière de la maison de Teahupoo, qui a l’avantage d’être située près d’une jolie rivière où il est possible de se baigner. Elle a aussi d’autres projets, tels que celui de pouvoir enfin s’établir en tant que couturière. Bien sûr, tous ces projets ne se concrétiseront qu’à la condition d’être bien organisée, mais Heiti a confiance en elle. Elle est déterminée à réussir.
Entrepreneure, enfin !
A l’heure actuelle, Heiti a mis en place la location saisonnière de la propriété de la presqu’île qu’elle a nommée “Hereatea Teahupoo”. La foi, la famille, restent le ciment sur lesquels elle construit son avenir. “Je suis vraiment confiante pour le futur. J’ai plus de temps à consacrer à la plus jeune de mes enfants qui n’a que 3 ans et je remercie le Seigneur pour tout ce que j’ai. Maintenant, je suis bien dans ma vie. Je demande juste ce dont j’ai besoin pour vivre et d’être heureuse en famille.”
Son message
“Je n’ai jamais rien eu sur un plateau d’or, je me suis battue pour obtenir tout ce que nous avons construit, nous dit Heiti. Tout ce que j’ai vécu dans mon enfance m’a permis d’apprendre et de ne pas répéter les erreurs de mes parents. Mais je ne leur en veux pas car ils ont fait de leur mieux. Mon histoire a fait de moi la personne que je suis, elle m’a rendue plus forte. Ce n’est pas parce qu’on n’a pas eu une enfance heureuse qu’on n’a pas le droit d’être heureux. C’est à nous de faire en sorte d’être heureux. Aujourd’hui, même mes frères et soeurs ont une vie heureuse.”
“On est maître de son destin, on a le choix de décider que tout le mal s’arrête là et de commencer à construire quelque chose de positif.” Heiti Wong.
Texte : Meria Orbeck / Photo : Heiti Wong / Mai 2019