Aujourd’hui, votre écrivaine publique préférée vous emmène à la rencontre d’une jeune femme extraordinaire, dont la créativité a trouvé à s’exprimer au travers de la conception de vêtements. C’est dans son appartement, en toute intimité et simplicité, qu’elle nous reçoit pour nous conter son histoire et partager sa passion du stylisme.
Depuis 2015, Mihia Degage, jeune mère de famille de 30 ans, crée des vêtements pour la marque Natuara’i. D’abord conçue pour les hommes, sa gamme de vêtements a évolué vers une offre pour les enfants et depuis peu, pour les femmes.
Une passion née dans l’enfance
“J’étais petite quand j’ai commencé à dessiner des vêtements. Je dessinais tout le temps, surtout des robes, nous confie-t-elle. Dans ma famille, personne ne fait de la couture. J’ai appris toute seule. Au début, j’ai confectionné des vêtements pour mes poupées Barbie. Je leur ai fait de superbes robes ! Au lycée, j’ai continué à dessiner, même en cours ! Nous avions une couturière, et quelquefois elle produisait mes modèles.”
Un parcours inattendu
En parallèle, Mihia est aussi enseignante en école élémentaire. “J’ai eu mon bac à 17 ans et j’ai pris une année sabbatique pour décider de ce que je ferais après. Je voulais faire une école d’art en France, mais ça n’était pas possible pour ma famille. Alors j’ai fait quelques petits boulots. Ensuite, mes parents m’ont inscrite à différents concours administratifs parce qu’ils s’inquiétaient pour mon avenir. J’ai finalement opté pour l’enseignement, en espérant pouvoir quitter rapidement cet emploi ! Mais j’y suis depuis onze ans…”
Après ses années de formation à l’Ecole Normale, elle est mutée aux Iles Marquises, pendant un an. “ J’étais dans une vallée reculée, à deux heures de tout, sans réseau internet ni téléphone. Je m’étais acheté une petite machine à coudre, du tissu et j’ai commencé à me faire mes propres robes. Sans patron, sans rien. Tant que ça m’allait et que c’était joli, c’était parfait.”
De retour à Tahiti après trois années d’enseignement dans les îles, Mihia continue de coudre. Cependant, si elle apprend de ses erreurs, son expérience reste assez limitée car elle se rend bien compte qu’elle a besoin de se former sur le patronage et sur les finitions. “Je ne savais coudre que pour moi, je ne savais pas le faire pour d’autres et les finitions n’étaient pas belles. J’ai donc suivi des formations.” Après ça, ses confections se sont nettement améliorées.
Par la suite, elle se met à coudre des chemises pour son compagnon et pour leur petit garçon. Les retours qu’elle reçoit de son entourage sont satisfaisants. On l’encourage petit à petit à en confectionner pour les autres. “C’est comme ça que tout a commencé. Ensuite, avec mon compagnon, nous avons décidé de prendre une patente et de lancer notre marque, Natuara’i, du nom de notre fils.”
Une gamme résolument polynésienne
Originaire des îles Australes par sa mère, Mihia a choisi de mettre en valeur la nature polynésienne au travers de ses créations, où les tissus floraux s’harmonisent merveilleusement avec les tons unis. Le logo de Natuara’i reprend d’ailleurs le “penu” très typique de ces îles du Sud polynésien. Elle tient également à ce que les produits soient “Made in Fenua” : “Mes créations sont réalisées entièrement à Tahiti. Nous faisons appel à une couturière patentée pour la confection et je m’occupe des finitions. Les vêtements sont exposés en dépôt-vente dans la boutique Kaly and Joy, un concept store qui réunit plusieurs créateurs polynésiens. Il se situe au Vaima.”
Des produits de qualité
Les tissus entrant dans la composition des oeuvres de Mihia proviennent de ses différents voyages. De la crêpe à la guipure, tout est source d’inspiration. “Ce qui démarque mes produits est la qualité du tissu et des finitions. J’utilise du chambray, de la crêpe, du lin, du coton et les finitions sont belles. J’ai introduit les boutons-pression, ce qui facilite l’habillement et donne des finitions plus jolies. Et ça évite la perte des boutons! Ensuite, il y a la coupe des chemises. Elle est sans pince. Pour les femmes, les robes épousent le corps.”
Mihia ne conçoit pas que du prêt-à-porter. “Je réalise des vêtements à la commande selon mes propres modèles et je peux apporter des retouches sur mes vêtements vendus en prêt-à-porter. Par contre, je refuse de réaliser des vêtements que je n’ai pas créés ou d’utiliser des tissus autres que les miens.”
Des projets plein la tête
L’entreprise Natuara’i Création est actuellement en pleine évolution, tant sur le plan administratif que commercial. “Nous sommes en train de finaliser le nouveau montage juridique en SARL.”
Une fois que les modifications nécessaires auront été apportées, Mihia se concentrera sur le développement de sa société. “En ce moment, je suis en train de négocier des contrats d’importance avec des grandes sociétés locales. Ensuite, je vais développer encore un peu plus la gamme féminine avec des défilés prévus tout au long de l’année. Il y aura la participation à la “Fashion Week” en juin et notre propre défilé, prévu en octobre, pour les quatre ans de la marque. Pour les hommes, nous publierons un calendrier qui mettra les chemises à l’honneur. Le but ultime est d’arriver à exporter nos collections à l’international.”
Pour réussir à gérer son temps, Mihia a dû apprendre à s’organiser. Elle a mis à profit les enseignements reçus à la Business Maker Academy. Je vous invite à lire l’article qui lui est consacré sur le site de Steeve Hamblin.
En quête de liberté
Si son emploi actuel lui plaît, Mihia compte néanmoins sur la possibilité de se consacrer de plus en plus, et pourquoi pas, de vivre entièrement de sa passion pour la création de vêtements. Pourtant, cette décision est loin de faire l’unanimité de ses proches, pour qui la sécurité de l’emploi semble primer sur l’épanouissement personnel de la jeune femme.
“Cela fait trois ans maintenant que je pense sérieusement à quitter mon emploi. Mais trois ans qu’on me freine. Alors j’en parle moins et je laisse faire les choses.” L’essor de sa société lui permettra d’atteindre son rêve : “Le temps est ce qu’il y a de plus précieux et l’une des raisons pour lesquelles je veux développer mon entreprise, c’est parce que je veux avoir plus de temps à consacrer à mon petit garçon, je veux le voir grandir et être disponible pour l’accompagner.”
Il faut oser se lancer et vivre de sa passion, oser sauter le pas. (Mihia Degage)