Jean-Pierre Raihauti, connu sous le surnom de JP, est coursier. Il a créé son entreprise en janvier 2000.
En janvier 2000, JP Raihauti crée son entreprise à la suite d’un constat : “Ma famille me sollicitait souvent pour aller faire quelques courses. J’ai vu qu’il y avait un besoin dans ce domaine. Je travaillais déjà pour une entreprise privée de coursiers où j’étais salarié à mi-temps. Il y avait un potentiel énorme et cette idée de créer ma propre entreprise me traversait l’esprit constamment .” C’était un challenge, mais JP s’est retroussé les manches et s’est lancé car il savait qu’il y avait tout un pan de ce secteur qui n’était pas exploité. “J’ai exploité le créneau comme les envois dans les îles par bateaux et avions pour les clients des autres archipels (Australes, Marquises, Gambier, Tuamotus, Iles sous le vent) ayant des besoins en denrées alimentaires et autres. Le créneau des week-ends aussi était exploitable comme les courses du marché le dimanche.”
A l’époque, il n’y avait pas énormément de sociétés dans le domaine du service de courses. Depuis, plus d’une dizaine de sociétés se sont montées. C’est donc un domaine qui s’est bien développé et qui nécessite de l’innovation.
“Il faut apporter plus que ce que le client demande. Mon slogan est “Pour vous servir”. Je me mets vraiment au service de ma clientèle. Par exemple, lorsque je fais des courses pour une personne âgée, je vais jusqu’à ranger sa commande dans ses réfrigérateur et garde-manger ! Je ne me contente pas de déposer les provisions sur la table. C’est une manière d’apporter une valeur ajoutée à mon service et un sourire à mes clients.”
La conséquence est que Jean-Pierre reçoit beaucoup de messages reconnaissants sur sa page professionnelle dans son réseau social préféré. “Certains messages me touchent beaucoup, comme “Jean-Pierre, merci à Viti Viti Coursier d’exister.” La publicité se fait surtout de bouche à oreille.”
Pour Jean-Pierre, la réputation d’une société de service est difficile à établir. “Ce n’est pas évident d’instaurer la confiance. On est dans de la prestation de service. Si tu fais du bon travail, ça se sait très vite, les gens en parlent sur les réseaux sociaux. Mais si tu fais du mauvais travail, ça se sait deux fois plus vite. Et là, tu es grillé.”
Jean-Pierre, cependant, préfère travailler en partenariat avec les autres sociétés de coursiers qu’il connaît. “Je n’ai pas pour habitude de dénigrer les collègues. Je préfère travailler avec les autres. J’ai deux partenaires, un sur Moorea et un autre à Tahiti. Quand je suis surchargé de travail, je fais appel à eux et vice-versa. C’est un contrat de confiance et de respect. On sait que chacun a de l’expérience et de la compétence. Ce sont des valeurs morales, professionnelles et humaines.”
Pour sa part, JP défend des valeurs personnelles fortes telles que le respect de soi-même et des autres. “Je reste fidèle à moi-même. J’ai des clients ponctuels et contractuels. Et il y a les cas d’urgence. Je ne cherche pas à répondre à toutes les demandes si je sais que je ne peux pas le faire. Dans ce cas-là, je partage. C’est aussi une valeur importante pour moi. Cela me permet d’éviter le stress, de soutenir mon réseau professionnel et de répondre favorablement à la clientèle.”
Le respect se montre également par la présentation de soi. “Etre présentable, agréable, à l’écoute et savoir rassurer le client, c’est important. L’image de la société passe par l’image de la personne, la présentation, la tenue vestimentaire.”
Un autre point qui est important pour JP est d’apporter un suivi à distance, via Messenger. “Nous prenons en photo et diffusons tout le parcours du colis d’un client. Nous le tenons informé de tout ce que nous faisons.”
Avec les nouvelles technologies, JP n’hésite pas à utiliser la vidéo pour communiquer avec les clients des îles. “Grâce à Internet, les distances sont réduites. Par exemple, je vais chercher une commande pour un client des Marquises. Dans le magasin, je me mets en communication vidéo avec lui et il peut voir tous les choix, les prix et décider lui-même de ce qui lui convient. C’est magnifique !”
Pour JP, son activité est sa passion. “Ma passion me conduit à ma mission : apporter du bien-être à l’autre. Un client satisfait fait mon bonheur et celui de mon entreprise.”
Des courses inédites
Par curiosité, nous avons demandé à JP s’il lui arrivait d’avoir à répondre à des demandes particulièrement inédites.
“Un jour, une commerçante de Huahine m’a demandé de lui trouver, à la veille de la Saint-Valentin, trente fleurs avec des petits nounours. Il y avait une forte demande. Elle avait tenté d’en obtenir mais sans succès et avait donc pensé à moi. J’ai pu lui trouver ses trente fleurs que j’ai négociées à bon prix, les lui envoyer et elle les a reçues dans les temps. Elle a publié sur ma page et m’a laissé un très bon commentaire car le jour J elle a tout vendu. Elle disait : “Je vois que derrière votre prestation de coursiers, il y a aussi ce côté négociateur.””
Une autre commande dont JP se souvient : “C’était un soir, pour un anniversaire. J’ai dû livrer un cadeau d’une épouse à son mari acheté à Carrefour Arue. Celui-ci a été très étonné que sa femme ait pu obtenir que nous fassions une livraison de nuit !”
Car Viti Viti Coursier travaille aussi la nuit ! “Généralement, les clients nous préviennent à l’avance des commandes de nuit.”
JP aime particulièrement livrer les cadeaux-surprises. “Cela met du baume au coeur et le sourire aux lèvres de celui ou celle qui le reçoit, surtout quand c’est un magnifique bouquet de fleurs.”
Il y aussi les commandes compliquées mais très instructives. “J’ai eu un jour à envoyer un chat par avion sur Bora-Bora. Ce que je ne savais pas, c’est qu’il fallait préparer l’animal en lui donnant des comprimés contre le stress pour l’empêcher de faire ses besoins et d’être malade pendant le transport. Evidemment, c’est ce qui s’est produit dans la voiture et du coup, je n’ai pas pu mettre le chat dans l’avion !” Depuis, JP sait ce qu’il faut faire.
Même les encombrants
Rien n’arrête Viti Viti Coursier. “Il m’est arrivé quelquefois de devoir enlever des encombrants. Quand c’est le cas, j’emprunte un camion-plateau. Mais je ne le fais que pour quelques communes qui disposent d’un endroit pour les stocker.”
Des hauts et des bas
JP, depuis qu’il a commencé, a expérimenté des périodes fastes comme des plus difficiles.
En 2010, il est victime d’un grave accident de la route en scooter (éboulement sur la RDO) après lequel, pendant deux ans, il doit faire face à une longue rééducation. Durant cette période, son entreprise tourne au ralenti, par délégation. “Je n’ai pas baissé les bras. J’ai fait toute ma rééducation et je me suis remis au travail dès que j’ai pu. Par contre, j’ai arrêté de faire des courses en deux-roues et j’ai pris une voiture.”
Avant cela, JP a rencontré d’autres difficultés. “Il y a eu des périodes de crise où certains clients ont mis la clé sous la porte. Cela se ressent sur le chiffre d’affaire. Grâce à ça, j’ai compris qu’il ne faut pas rester sur ses acquis. Il faut toujours chercher de nouveaux contrats, car quand on perd un bon client, cela impacte non seulement le chiffre d’affaire mais également le moral. En ce qui me concerne, je me remets tout le temps en question, je cherche toujours à améliorer mon service. C’est cette passion pour mon activité qui m’a permis de me relancer dans les moments délicats.”
Aujourd’hui, l’entreprise de JP est stable mais il ne s’en contente pas. “J’ai de nouveaux objectifs, notamment de développer les îles. Beaucoup d’îles ne connaissent pas notre existence. Ce sont des niches à exploiter. Il faut se faire connaître, augmenter notre visibilité.”
Pour cela, JP a suivi des formations en management à la CCISM et avec des formateurs privés comme Jean-Paul Tuaiva, Steeve Hamblin, Vaiana Tama ou encore Richard Tuheiava.
“Ces formations m’ont permis de revoir ma stratégie commerciale. Je vais à la rencontre des femmes et des hommes d’affaire pour discuter. J’ai vu leur parcours et leur détermination. Ils ont un objectif et s’y tiennent. Je prends exemple sur eux. Se fixer un objectif, se rappeler pourquoi on s’y tient.”
Ces personnes lui ont donné comme conseil d’avoir une ligne de conduite, de la discipline. “La réussite passe par la discipline, une ligne de conduite et des valeurs. Ce sont des règles d’or qu’il faut respecter. Si tu les enfreins, c’est toi-même que tu sabotes.”
En faisant une comparaison entre ses débuts et maintenant, JP se rend compte de l’évolution qu’il a vécue : “Au début, je me suis lancé un challenge. J’avais envie de le faire et c’était une façon de se dépasser et de se rendre compte que j’étais capable de faire quelque chose de bien pour moi et les autres. Mais c’était une aventure où j’étais seul. Toutes les personnes que j’ai côtoyées depuis, ces rencontres, ces formations m’ont donné une boussole. Elles m’ont guidé. Elles m’ont accompagné et m’ont évité de tomber dans les pièges du business. Elles m’ont permis aussi de surmonter ma peur. Il y a des choses que je fais aujourd’hui que je n’aurais pas pu faire il y a vingt ans. J’ai compris que l’ignorance est un handicap mental qui mène à la peur et à la paralysie. Celui qui surmonte sa peur et qui se lance quand même, gagne de la confiance en soi. J’ai appris des choses, j’ai pris de l’assurance.”
Cette confiance en soi, JP l’utilise pour mieux se faire connaître au travers des médias. “L’an dernier, je suis passé sur Radio Tefana pour une interview. Cette diffusion m’a permis d’avoir de nouveaux clients dans les îles.” Il attend une future interview de Polynésie la 1ère. “Je suis dans cette optique de me faire connaître au maximum, par les médias ou par de simples flyers disposés chez mes clients, car c’est ce qu’il faut faire si on ne veut pas être oublié.”
“J’ai débuté avec de la motivation. Mais cela n’est pas suffisant. Une bonne gestion de ton entreprise est une des clés de la réussite. Se remettre en question, se former, apprendre sont les oxygènes également de ton BUSINESS. Quand on me demande aujourd’hui : “Qu’est-ce qui t’a permis, Jean-Pierre, de résister et de tenir bon ?” Je réponds :
“Pour durer et s’accrocher, il faut ajouter deux carburants à ta motivation de départ : la FOI et la PASSION, sinon c’est l’abandon qui t’attend au tournant.””
Pratique :
FB : Viti Viti Coursier
Email : vitiviticoursier@gmail.com
Tel : 87 78 43 51
Texte : Meria Orbeck / Photos : JP Raihauti / Août 2019